Selon la définition officielle de l’Association internationale pour l’étude de la douleur (IASP), « la douleur est une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable associée à une lésion tissulaire réelle ou potentielle ou décrite dans ces termes ». Elle est donc subjective et repose avant tout sur le ressenti du patient, ce qui la rend difficile à quantifier et à qualifier.

La douleur aiguë joue donc un rôle d’alarme qui va permettre à l’organisme de réagir et de se protéger face à un stimulus mécanique, chimique ou thermique. En revanche, quand la douleur est chronique, ce mécanisme d’alarme n’est plus justifié et la douleur devient dans ce cas pathologique.

La nociception

La sensation de nociception est l’ensemble des phénomènes permettant l’intégration au niveau du système nerveux central d’un stimulus douloureux via l’activation des nocicepteurs (récepteurs à la douleur) cutanés, musculaires et articulaires. Le transport de l’information sensorielle par les nerfs se fait de la périphérie (lieu du ressenti de la douleur) jusqu’à l’encéphale.

La nociception est donc le processus sensoriel à l’origine du message nerveux qui provoque la douleur.

Le circuit de la douleur

Pour ressentir une douleur, il faut:

-un détecteur

-un transmetteur

-un centre d’analyse des informations.

Les détecteurs spécialisés dans la douleur sont donc  les nocicepteurs. Ils sont répartis dans le corps, que ce soit dans la peau, les muscles, les articulations ou encore les viscères. Ce sont des terminaisons nerveuses spécialisées qui vont générer un message chimique et l’envoyer par l’intermédiaire d’un transmetteur : les nerfs.

Le message peut emprunter la voie réflexe. Il passe alors par la moelle épinière pour déclencher par exemple, le retrait d’une main qui se brûle sans même y réfléchir.

Mais le message peut aussi continuer jusqu’au cerveau pour l’alerter, et plus particulièrement au niveau du fameux cortex somato-sensoriel. Ce dernier analyse le message et perçoit la sensation douloureuse.

Ce centre est proche du système limbique qui correspond au centre des émotions. Il est aussi proche du centre de la mémoire qui fera en sorte de se rappeler que le fait de toucher une flamme peut s’avérer douloureux.

Ce centre est également proche du cortex moteur chargé d’exécuter les ordres afin de soulager cette douleur.

Les mécanismes de la douleur

Dans la moelle épinière existent des relais qui mènent jusqu’au cerveau, lieu où s’effectuent des modulations de la transmission des sensations de douleur par des mécanismes de contrôles :-certains accentuent la douleur-d’autres l’inhibent.  Le niveau d’intensité d’une douleur dépend du déséquilibre entre les premiers et les seconds.On a démontré, par exemple, que le toucher (massage,pression…) exerce une action inhibitrice sur la sensibilité douloureuse. On sait depuis longtemps qu’une douleur peut être inhibée par un massage et que lorsque deux douleurs surviennent simultanément, la plus violente inhibe la plus faible.

Il existe des substances naturelles, appelées endorphines qui possèdent une action puissante d’inhibition de la douleur semblable à celle de la morphine.
De plus, les mécanismes de contrôle sont mis en jeu par des facteurs psychologiques. Par exemple la signification plus ou moins anxieuse donnée à une douleur intervient pour beaucoup dans les différences de perception des douleurs. L’incertitude, l’absence d’explication sur une douleur peuvent faire craindre une cause grave, et augmenter la douleur. Ainsi les acouphènes, au départ simplement gênants, peuvent-ils devenir insupportables. Une migraine prend des proportions terribles si elle est majorée par l’anxiété…

Le rôle des contrôles inhibiteurs de la douleur est important à retenir car ceux-ci sont le fondement du traitement de la douleur. Ces contrôles inhibiteurs sont sous la dépendance de plusieurs influences :

-la condition physique

-l’attention

-l’angoisse, la peur

-le stress.

La douleur chronique

On peut comparer les mécanismes d’entretien de la douleur à ceux de la mémoire : même si le problème initial est guéri et qu’il n’y a plus de lésion, le système nerveux peut en garder le souvenir.

Nombreux sont les facteurs qui augmentent l’intensité et la durée de la douleur.

Les tensions et les contractions musculaires

Une douleur peut s’accompagner de contractions musculaires réflexes. Le muscle contracté devient alors le siège d’une nouvelle douleur qui favorise à son tour une nouvelle contraction, et ainsi de suite.

Les céphalées par tension nerveuse ou  contraction musculaire se caractérisent par l’apparition de douleurs sourdes ou de pressions du cuir chevelu,  mais aussi d’autres zones névralgiques comme les tempes ou la partie postérieure du cou.

L’attention

Parmi toutes les sensations, la douleur est celle qui capte le plusnotre attention. Il est difficile de s’en détacher, elle devient le centre de nos préoccupations: à l’écoute de notre corps, nous ne pensons plus qu’à cela et la douleur devient obsessionnelle (acouphènes). Focaliser son attention sur sa douleur, c’est entretenir sa douleur.
Il existe toutefois un niveau au-dessous duquel l’attention peut être portée ailleurs : la douleur peut être oubliée. Un traitement peut donc comporter des techniques dont le rôle est de diminuer l’attention que nous portons à la douleur.

L’anxiété

L’appréhension, la crainte de l’inconnu, la peur, entretiennent aussi la douleur. Chez les personnes souffrantes, les pensées, souvent moroses, se concentrent souvent sur la douleur, vécue comme atroce, horrible, insupportable et ayant complètement ruiné leur vie. Elles s’attendent à des difficultés continuelles et à une vie épouvantable. Les chercheurs ont découvert que la dramatisation augmente la douleur et peut aussi accentuer la peur, l’anxiété, la dépression et le stress.

Un état anxieux avant une opération, la capacité à amplifier une douleur, mais également une douleur aiguë ressentie dans les jours suivant l’intervention, augmentent le risque de souffrir de douleurs chroniques post-opératoires jusqu’à trois mois après, et ce, indépendamment de la nature de cette chirurgie. C’est ce que montre la dernière étude d’une équipe de l’Inserm qui s’intéresse aux déterminants de la douleur chronique.

Le stress

Le stress est souvent associé à des émotions (colère, agressivité,anxiété, démoralisation…), et à des manifestations telles que tensions ou contractures musculaires qui peuvent accentuer la douleur.  Le cercle vicieux douleur-stress est fréquent chez la personne qui souffre de douleurs persistantes.

Les douleurs qu’on n’explique pas complètement, difficiles à traiter ou pour lesquelles la médecine s’interroge, sont source d’inquiétude et de souffrance.

Il n’existe aucun test pour mesurer la douleur. Mais l’évaluation de la douleur est nécessaire pour connaître ses mécanismes, son intensité, son retentissement, les traitements effectués antérieurement et en cas d’échec, la compréhension des raisons de cet échec.

Les douleurs sans lésion identifiable comme l’intestin irritable (colopathie fonctionnelle), certaines brûlures d’estomac, des douleurs urinaires sans infection, des douleurs de l’articulation temporo-mandibulaire, ou certains maux de tête… sont des douleurs bien réelles et souvent très invalidantes mais les examens, multiples, ne révèlent rien. On pense actuellement qu’il s’agit plutôt d’un dysfonctionnement des organes, avec excès de contraction ou de tension des muscles.

Reste que l’anxiété entraîne des phénomènes physiques (tension musculaire,contractions, respiration rapide et superficielle) et un retentissement psychologique. Et « l’hyper-vigilance » responsable en partie de l’auto-entretien en cercle vicieux de la douleur, mobilise beaucoup d’énergie, engendre du stress et une augmentation de la douleur.