Une équipe de chercheurs (CNRS-Inserm-Paris VI-Université Louis Pasteur) menée par José-Alain Sahel et Thierry Léveillard (Unité mixte Inserm-Paris VI « Laboratoire de Physiopathologie Cellulaire et Moléculaire et de la Rétine »), a identifié une nouvelle protéine nécessaire à la survie de certains photorécepteurs, essentiels à l’acuité visuelle.

La rétinite pigmentaire est une maladie héréditaire, familiale, chronique et progressive, pouvant prendre plusieurs formes, et caractérisée par une dégénérescence (destruction) des pigments de la rétine.

La rétinite pigmentaire affecte environ trois millions de personnes dans le monde et environ 40 000 personnes en France. Il existe des gènes défectueux, surtout pour les formes dominantes (environ 20 % de tous les cas).

Les rétinopathies pigmentaires se manifestent par un défaut d’adaptation à l’obscurité et un rétrécissement du champ visuel qui s’accentue au fil du temps. Une baisse de l’acuité visuelle est souvent perçue après quelques années, pouvant évoluer jusqu’à une vision faible et un rétrécissement du champ visuel, voire la cécité. La rétinite pigmentaire est une dégénérescence bilatérale, autrement dit des deux côtés, des deux yeux.

Les cônes et les bâtonnets de la rétine sont les cellules réceptrices de la lumière. Plus précisément, les cellules transforment la lumière pénétrant dans l’œil en influx nerveux, puis elles la décryptent sous forme d’une image par le cerveau.

Cette pathologie se caractérise par une dégnérescence des batonnets puis des cônes. Les premiers, responsables de la vision nocturne, finissent par disparâitre. Quant aux cônes, agents de la vision diurne, quand ils ont cessé de fonctionner, ils restent présents et connectés au cerveau. Il est donc possible de les réactiver.

Cette avancée scientifique ouvre des perspectives thérapeutiques pour les maladies liées à la dégénérescence de ces cellules, telles que les rétinopathies pigmentaires. Ces maladies, entraînant la cécité, ne bénéficient actuellement d’aucun traitement. Le détail de ces recherches, menées en étroite collaboration avec Novartis Ophthalmics et les Novartis Institutes for Biomedical Research et financées notamment grâce aux dons du Téléthon, sera publié dans la revue Nature Genetics de juillet 2004 (accessible en ligne dès le 27 juin).

Parmi les approches correctives proposées actuellement, la thérapie génique cible sélectivement le gène incriminé. Les approches neuroprotectrices, quant à elles, ont des applications potentielles larges, mais sont peu spécifiques.

Les orientations prises par les chercheurs de l’Unité Inserm-Paris VI et de l’IGBMC visent à identifier les évènements conduisant à la dégénérescence secondaire des cônes, afin de limiter leur disparition.

Le fait que cette dégénérescence survienne après celle des bâtonnets a conduit les chercheurs à envisager l’hypothèse d’une dépendance trophique (qui se rapporte à la nutrition des tissus et des organes) des cônes sur les bâtonnets.

Pour tester cette hypothèse, des bâtonnets ont été transplantés chez un modèle animal porteur d’une rétinopathie pigmentaire (des souris), à un stade où l’ensemble des bâtonnets a dégénéré, et où les cônes n’en sont qu’au début du processus de dégénérescence. Cette intervention ralentit de moitié la dégénérescence des cônes.
Les chercheurs ont passé en revue systématiquement l’ensemble des gènes exprimés par la rétine normale afin de trouver ceux qui pourraient bloquer la mort des cônes.

Ces travaux ont conduit à l’identification d’une première protéine, « Rod-derived Cone Viability Factor » (RdCVF), sécrétée et exprimée spécifiquement par les bâtonnets, et qui disparaît après la première phase de dégénérescence des bâtonnets.

Les chercheurs vont maintenant s’attacher à élucider le mécanisme d’action de cette protéine et ils ont engagé des recherches précliniques pour son utilisation dans la thérapie des dégénérescences rétiniennes. Dans un deuxième temps, l’utilisation thérapeutique potentielle dans la dégénérescence Maculaire liée à l’Age (DMLA) sera explorée.

Cette découverte marque une étape essentielle vers la thérapeutique des dégénérescences rétiniennes et ouvre de nombreuses perspectives.